Choisir son paillage… ou ne pas choisir son paillage!

Un feu de paille, être sur la paille, la paille dans l’œil du voisin, être de paille, croix de paille. La paille est présente dans beaucoup d’expressions françaises, pour exprimer des être ou des choses en général sans valeur. Mais nous, jardiniers, connaissons les importants avantages qu’un paillage (dans son sens large) peut apporter au potager, mais aussi au jardin. Je vous propose une réflexion sur comment choisir son paillage: ne le tirez pas à la courte paille!

Un paillage c’est quoi?

Le paillage est une technique de culture qui a pour but de recouvrir le sol en épandant des matériaux. Les avantages sont variés en fonction du paillage choisi. Le paillage est au départ, comme son nom l’indique fait de paille. Sons sens a été élargi, et concerne maintenant tous les matériaux que l’ont peut étendre sur le sol afin de le couvrir. Bon mais alors quel mot plus juste peut-on utiliser? Couverture de sol : un peu long. Mulch : le mot anglais. Bon bref en français l’idée est un peu restreinte au niveau vocabulaire, mais l’envie est là!

Choisir son paillage

Un paillage, quel qu’il soit, doit avoir les qualités suivantes :

  • Être épais pour éviter la pousse de plantes non désirées,
  • Conserver l’humidité su sol (et ainsi limiter les arrosages),
  • Préserver le sol des dégradations et de l’érosion par la pluie, le vent, le ruissellement…

Le paillage peut (et c’est même souvent souhaité) avoir les qualités suivantes :

  • Se dégrader afin de participer à l’enrichissement de la vie biologique du sol,
  • Etre écologique,
  • Alléger le sol et ainsi se substituer au labour pour certaines cultures.

Un bon paillage c’est un paillage que l’on ne choisit pas!

Riche en azote? Riche en matières carbonées? Durable? Qui nourrit le sol? A mon sens, le meilleur paillage doit surtout tout d’abord être gratuit. En effet cela permet d’utiliser les surplus de biomasse créés par nos activités humaines. Quel dommage de voir nos déchetteries de déchets verts pleines, les voitures chargées à blocs attendant leur tour, moteur allumé, pour jeter autant de matières premières. Certains déchets ne portent vraiment pas bien leur nom…

Certaines entreprises se rassemblent pour créer une écologie industrielle, fondée sur l’analyse des flux de matières et d’énergie, ne pourrait-on pas imaginer sur le même principe une écologie du paillage? « Déchets » de tonte ou de fauche, de taille, branches broyées, feuilles mortes… pourraient ainsi rendre de grands services aux jardiniers amateurs et professionnels. Déchetteries, investissez dans des broyeurs et ouvrez vos tas aux jardiniers amateurs. Jardiniers, récupérez tontes, tailles, feuilles mortes près de chez vous et épandez-les dans votre jardin.

Choisir son paillage n’a alors plus de sens : c’est le paillage qui nous choisit !

Un bon paillage, c’est un paillage adapté au contexte

Certaines surfaces cultivées sont recouvertes de pierres de lave noires en guise de paillage sur l’île de Lanzarote aux canaries. En fait, l’humidité de l’air est retenue dans les porosités des pierres volcaniques qui la restituent ensuite aux cultures. Et pour une île volcanique où il ne pleut que un jour par mois, cette humidité captée est indispensable à l’hydratation des plantes. Ces pierres volcaniques facilement accessibles ont permis de développer une agriculture sur ces terres si dures à cultiver.

Paillage à Lanzarote, Canaries

Alors non, je ne vous conseille pas de choisir un paillage de pierres de lave pour votre potager (à moins que vous n’habitiez à Lanzarote), mais de vous adapter à votre contexte : déterminez vos besoins, et les matériaux disponibles à proximité. En général, le paillage organique apporte plus d’avantages qu’un paillage minéral (ardoises, pierres volcaniques …) ou plastique (toiles étendues) puisqu’il protège votre sol tout en l’améliorant. C’est vrai que cela demande un peu de réflexion au départ pour trouver les matériaux adéquats et avoir un paillage équilibré, mais rassurez vous, le dosage n’a pas besoin d’être précis.

Evaluez les zones que vous souhaitez pailler. Les plantes n’ont pas les même besoins, certaines sont gourmandes en azote (aubergines, chou-fleur, concombre, maïs, rosiers …),  alors que les légumineuses produisent elles-même leur azote (pois, haricots, fèves, glycine …). Si vous exportez une partie de vos plantes (taille, récolte) il vous faut bien entendu compenser cette perte grâce à un paillage organique par exemple.

Un bon paillage, c’est un paillage interprété et corrigé

« Le grave défaut est d’avoir des défauts et de ne pas s’efforcer de s’en corriger. » Confucius.

Quand on se laisse choisir par son paillage, forcément on doit s’adapter à ce qu’on trouve. Apprivoisez votre paillage, ses défauts, ses qualités… puis corrigez-les ! Les paillages organiques sont très intéressants au potager puisqu’ils permettent de couvrir le sol en participant à son amélioration. Afin de conserver un paillage équilibré, vous devrez cependant porter votre attention sur l’équilibre entre azote et carbone. En sachant que environ 4 unités d’azote sont nécessaires aux organismes pour dégrader 100 unités de carbone :

le rapport C/N du paillage doit être proche de 20-25

Plus : les organismes puisent l’azote du sol et entraînent une faim d’azote qui pénalise les plantes présentes.
Moins : l’azote est lessivé et donc perdu si le sol et les plantes ne sont plus capables de le stocker.

Une fois la matière organique et les organismes dégradés, les nutriments reviennent au sol et peuvent se rendre disponibles pour les plantes.

Choisir son paillage tableau comparatif
Tableau comparatif des paillages : choisir son paillage ou ne pas choisir son paillage … et le corriger !

D’une manière générale mieux vaux choisir son paillage carboné en automne, lorsque les plantes n’ont pas besoin d’azote et un paillage azoté lorsque la végétation est en pleine croissance (et ainsi éviter le lessivage de l’azote). Par contre le paillage ralentit le réchauffement du sol. Si cela est pénalisant dans votre région, écartez-le aux premiers beaux jours, puis remettez-le une fois les cultures en place.

Un bon paillage, c’est un paillage plein de gastéropodes …

C’est LE gros défaut des paillages, ils fournissent abris à nos amis … C’est vrai que chaque être a sa place dans un écosystème, et je veux bien partager quelques feuilles de mes salades avec eux, mais les razzias sur mes semis sont psychologiquement difficilement tenables.

Il paraîtrait que le paillage avec des paillettes de lin et de chanvre limiterait le déplacement des gastéropodes, à tester donc. Oui, mais moi, j’e n’en ai pas près de chez moi… la vie est faite de compromis avec soi-même. Choisir son paillage, ne pas choisir son paillage… telle est la question !

Dans son livre le potager du paresseux, Didier Helmstetter propose de réfléchir à cultiver… sur un paillage vivant. L’idée mérite effectivement d’être développée, en choisissant des plantes non concurrentielles en aérien et en souterrain. Plutôt facile à mettre en place dans un massif, plus difficile à réaliser au potager. Vous trouverez par ailleurs dans ce livre très intéressant beaucoup d’informations sur la biodiversité du sol utile au potager, ainsi que le paillage avec du foin.

En savoir plus sur les rapports C/N fournis dans le tableau.

Mon carré barbecue
Guide Haie façon forêt-jardin
Carré potager jaune

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11 réponses

  1. Adeline dit :

    Bonjour !
    Et quid de la paille… venant d’un agriculteur en conventionnel ? Est-ce que les pesticides utilisés sont présents en grande quantité dans la paille ?

    • Perpétuelle dit :

      Bonjour Adeline,
      La question de l’utilisation de sous-produits issus de l’agriculture conventionnelle est je trouve délicate. En effet, leur utilisation comme produit local est vraiment intéressante dans une démarche environnementale, mais il y a très certainement des résidus de produits phytosanitaires présents dedans. En quelle proportion ? Difficile de le savoir. Le mieux est sans doute d’en parler avec l’agriculteur qui vous la fournit. Si ses traitements sont réalisés peu avant la récolte, alors je vous déconseille vraiment de les utiliser. J’avais notamment entendu parler d’herbicides pulvérisés sur le blé seulement quelques jours avant récolte comme agent desséchant…
      En tout cas, si vous choisissez de pailler votre potager avec de la paille, pensez à apporter des matières azotées pour rééquilibrer.

  2. Bonnet dit :

    Bonjour puis je utiliser des aiguilles de pins en tant que paillage dans mon potager merci

    • Perpétuelle dit :

      Bonjour,
      Les aiguilles de pins sont difficilement minéralisable et vont donc acidifier le sol et “bloquer la matière organique”. Je pense que si votre sol est calcaire, vous pouvez en utiliser en mélange avec une matière organique plus facilement dégradable. Par contre mieux vaut éviter en sols acides. Pour en savoir plus sur votre sol, n’hésitez pas à consulter l’article https://perpetuelle-paysages-comestibles.com/apprivoisez-votre-sol/
      Bon jardinage !

  3. Janot dit :

    Le mot mulch est d origine française !!! eh oui !!! mulcher pour être exact. il a été utilisé par les anglo-saxons qui en ont fait un mot utilisé dans leur langue 😉… Donc cocorico !!! 🤣🤣🤣

  4. GARCIA Bénédicte dit :

    OUI merci Anaïs !!! très intéressant ton article sur le paillage…je suis à fond sur tes conseils !
    Bonne continuation et surtout dans l’attente des prochains conseils…

  5. Girard Jean-Louis dit :

    Merci Anais pour ces précieux renseignements sur le paillage
    Je fais suivre à tous les participants des jardins partagés où nous avons une parcelle à cote de Saint Hugues de Biviers
    Jean-Louis

  1. 14 mars 2022

    […] La destruction d’un sol. Si vous avez un sol (et un dos !) en bon état, posez-vous les bonnes questions. Il n’est pas forcément justifier de dépenser autant d’énergie pour détruire votre sol. Améliorez-le avec un bon paillage. […]

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